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DE L’AMOUR ET DE LA POLITIQUE

— Madame, dit-il, expliquez-vous. En vérité, je ne comprends pas.

— Eh bien, dit-elle, regardez. Et elle lui remit le mandat d’arrêt.

Il le prit, l’examina, puis tressaillit. Et alors, toujours sans parler, il cacha son visage dans ses mains.

— Eh quoi ! Prenez-vous les choses avec ce découragement ? Autant chercher du vin dans le seau à lait, que de l’amour dans le cœur de cette enfant. Finissez-en, et soyez un homme ! Après la ligue des lions, faisons la conjuration des souris, et jetons bas tout ce bel échafaudage. Vous étiez assez vif hier au soir, quand il n’y avait rien en jeu et que tout était à la plaisanterie. Eh bien, voici qui vaut mieux… Voici qui est vivre, en vérité !

Il se leva avec assez d’alacrité, et sur son visage rougissant apparut un air de résolution.

— Madame de Rosen, dit-il, je ne suis ni insensible ni ingrat : en ceci je ne vois que la continuation de votre amitié. Il me faut néanmoins désappointer vos espérances. Vous semblez attendre de moi quelque effort de résistance ; mais pourquoi résister ? Je n’y ai presque rien à gagner, et maintenant que j’ai lu ce papier et que le dernier coin de mon paradis imaginaire est bouleversé, ce ne serait qu’hyperbole de parler d’Othon de Grunewald comme de quelqu’un qui ait encore quelque chose à perdre. Je n’ai pas de parti, pas de politique ; je n’ai pas d’orgueil, ni rien de quoi m’enorgueillir. En vue de quel gain, en raison de quel principe humain voudriez-vous que je