Aller au contenu

Page:Stevenson - Saint-Yves.djvu/170

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


IV

Le diable et son train à Amersham Place.


Jamais deux créatures humaines ne se redressèrent sur leurs pieds aussi rapidement que nous le fîmes, le notaire et moi, en cette occasion. Nous avions fermé et verrouillé la porte principale de notre citadelle ; mais, malheureusement, nous avions laissé ouverte la poterne de la salle de bain ; c’est de là que nous arrivaient les trompettes ennemies, et tous nos travaux de défense se trouvaient pris à revers. Je lançai un coup d’œil effaré à M. Romaine, qui lui même me fit l’effet d’un homme anéanti ; et puis je transportai mes yeux sur l’adversaire.

Il avait son chapeau sur la tête, un peu de côté : un chapeau très haut, presque pointu, avec des bords étroits et relevés. Ses cheveux étaient frisés par masses, comme ceux d’un chanteur des rues italien, — une mode, en vérité, impardonnable. Il était vêtu d’un large manteau de ratine, tel qu’en portent les cochers ; mais l’intérieur était doublé de fourrure de prix, et il le tenait à demi ouvert pour montrer, au-dessous, un linge d’une finesse exquise, l’éclat bariolé d’un gilet de soie, et toute une bijouterie de chaînes de montre, de breloques et de broches. La jambe et la cheville étaient admirablement tournées. Avec tout cela, je dus bien admettre qu’il me ressemblait un peu, puisque nombre de personnes diverses en avaient fait la remarque ; mais pour ma part, vraiment, je n’en voyais rien. En tout cas, il était certainement plus beau