et mon cœur se mit à sauter de joie. Mais ce ne fut que pour un court moment : car, tout de suite, je reconnus tout ce que mon rêve avait d’impossible. « Si seulement je puis apercevoir la lumière de sa lampe, si je puis entrevoir son ombre sur un rideau, — me disais-je, — je devrai déjà m’estimer bien heureux ! »
J’avais devant moi environ deux lieues d’une route le plus souvent montante, et qui, cette nuit-là, se trouvait être pour moi particulièrement difficile. Aussitôt que j’eus dépassé les dernières lanternes des rues, je tombai dans une obscurité profonde, à peine nuancée, de loin en loin, par une vague petite lumière aux fenêtres d’une ferme, où les chiens aboyaient, la tête levée, sur mon passage. Le vent continuait à faiblir : ce n’avait été, décidément, qu’une bourrasque, non une tempête. Mais, par contre, la pluie s’était renforcée et consolidée, pour devenir un véritable déluge, qui avait vite achevé de me pénétrer jusqu’aux os. Et je continuais à patauger, dans la nuit, en lutte avec de sombres pensées, et accompagné par les ululements lugubres des chiens.
Je n’étais guère dans une bonne disposition pour un rendez-vous amoureux. « Jamais encore on n’a fait une demande en mariage dans de telles conditions ! » me disais-je ; et plus d’une fois je fus sur le point de m’en retourner auprès de Rowley. Avec ma dépression d’esprit, avec mes vêtements tout boueux et mes mains toutes mouillées, quelle figure allais-je faire aux yeux de la jeune fille que je prétendais conquérir ? Mais, d’autre part, je songeai que cette nuit affreuse avait chance d’être plus favorable qu’une autre à mon entreprise. C’était à présent, ou jamais, que je devais trouver quelque moyen d’avoir une entrevue avec Flora !
Arrivé dans le jardin du cottage, je rencontrai un ensemble de circonstances le moins encourageant du monde. Par deux trous ronds dans les volets du salon jaillissait vivement la lumière d’une lampe ; à l’entour, rien que des ténèbres. Les arbres, les buissons, étaient saturés