Page:Stirner - L’Unique et sa propriété, trad. Reclaire, 1900.djvu/152

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qu’individus, nous fassions nos propres affaires et poursuivions nos intérêts personnels, peu importe à l’État ; cela concerne exclusivement notre vie privée ; purement, uniquement humaine est notre vie publique ou sociale. Ce qu’il y a en nous d’inhumain, d’ « égoïste » doit rester confiné dans le cercle inférieur des « affaires privées », et nous distinguons soigneusement l’État de la « société civile », domaine de l’ « égoïsme ».

Le véritable Homme, c’est la Nation ; l’individu, lui, est toujours un égoïste. Dépouillez donc cette individualité qui vous isole, cet individualisme qui ne souffle qu’inégalité égoïste et discorde, et consacrez-vous entièrement au véritable Homme, à la Nation, à l’État. Alors seulement vous acquerrez votre pleine valeur d’hommes et vous jouirez de ce qu’il appartient à l’Homme de posséder ; l’État, qui est le véritable Homme, vous fera place à la table commune et vous confèrera les « droits de l’Homme », les droits que l’Homme seul donne et que seul l’Homme reçoit.

Tel est le principe civique.

Le civisme, c’est l’idée que l’État est tout, qu’il est l’Homme par excellence et que la valeur de l’individu comme homme dérive de sa qualité de citoyen. À ce point de vue, le mérite suprême est d’être bon citoyen ; il n’est rien de supérieur, à moins que le vieil idéal — bon chrétien.

La bourgeoisie se développa au cours de la lutte contre les castes privilégiées, par lesquelles elle était, sous le nom de « tiers état », cavalièrement traitée et confondue avec la « canaille ». Jusqu’alors avait prévalu dans l’État le principe de l’ « inégalité des personnes ». Le fils d’un noble était, de droit, appelé à remplir des charges auxquelles aspiraient en vain les bourgeois les plus instruits, etc. Le sentiment de la bourgeoisie se souleva contre cette situation : plus de prérogatives personnelles, plus de privilèges, plus