Page:Stirner - L’Unique et sa propriété, trad. Reclaire, 1900.djvu/212

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

cherchais mon « meilleur moi-même » hors de moi ; j’étais l’inhumain parce que je rêvais de l’ « humain » : j’imitais les pieux que tantalise leur « vrai moi » et qui restent toujours de « pauvres pécheurs » ; je ne me concevais que par contraste avec un autre ; cela suffit, je n’étais pas tout dans tout, je n’étais pas — Unique. Mais aujourd’hui je cesse de me regarder comme l’inhumain, je cesse de me mesurer et de me laisser mesurer à l’aune de l’Homme, je cesse de m’incliner devant quelque chose de supérieur à moi, et ainsi — adieu, ô Critique humain ! J’ai été l’inhumain, mais je n’ai fait que passer par là, et je ne le suis plus : je suis l’Unique, je suis l’Égoïste, cet égoïste qui te fait horreur ; mais mon égoïsme n’est pas de ceux que l’on peut peser à la balance de l’humanité, du désintéressement, etc., c’est l’égoïsme de — l’Unique !

Il faut nous arrêter encore à un autre passage du même fascicule : « La Critique ne pose aucun dogme et ne veut rien connaître d’autre que les objets. »

La Critique redoute d’être « dogmatique » et d’édifier des dogmes. Naturellement, car ce serait là passer aux antipodes de la critique, au dogmatisme, et, comme critique, de bon devenir mauvais, de désintéressé égoïste, etc. « Pas de dogmes ! » tel est — le sien. Car Critique et Dogmatique restent sur le même terrain, celui des pensées. Comme le dogmatique, le critique a toujours pour point de départ une pensée, mais il se distingue de son adversaire en ce qu’il ne cesse de maintenir la pensée qui lui sert de principe sous l’empire d’un processus mental qui ne lui permet d’acquérir aucune stabilité. Il fait simplement prévaloir en elle le processus intellectuel sur la foi, et le progrès dans le penser sur l’immobilité. Aux yeux du Critique, aucune pensée n’est assurée, car toute pensée est elle-même le penser ou l’esprit pensant.

C’est pourquoi, je le répète, le monde religieux — qui est précisément le monde des pensées — atteint