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Page:Stirner - L’Unique et sa propriété, trad. Reclaire, 1900.djvu/323

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qui transgresse les commandements de l’État peut être considéré comme violant les commandements de Dieu, opinion, d’ailleurs, que l’Église a soutenue. Dieu est la Sainteté en soi et pour soi, et les commandements de l’Église comme ceux de l’État sont les ordres que cette Sainteté donne au monde par l’intermédiaire de ses prêtres ou de ses maîtres de droit divin. L’Église avait les péchés mortels, l’État a les crimes qui entraînent la mort ; elle avait ses hérétiques, il a ses traîtres ; elle avait des pénitences, il a des pénalités ; elle avait les inquisiteurs, il a les agents du fisc ; bref, à l’une le péché, à l’autre le crime ; là, le pécheur, ici, le criminel ; là, l’inquisition, et ici — encore l’inquisition ! La sainteté de l’État ne tombera-t-elle pas comme est tombée la sainteté de l’Église ? La crainte de ses lois, le respect de sa majesté, la misère et l’humiliation de ses sujets, tout cela va-t-il durer ? Ne viendra-t-il pas un jour où l’on cessera de se prosterner devant l’image du saint ?

Quelle folie d’exiger que le pouvoir de l’État lutte à armes courtoises avec l’individu et, comme on l’a dit à propos de la liberté de la presse, partage avec son adversaire le vent et le soleil ! Pour que l’État, cette idée, ait un pouvoir réel, il doit être une puissance supérieure à l’individu. L’État est « sacré », donc il ne peut pas prêter le flanc aux « attaques impies » des individus. Si l’État est sacré, il faut une censure. Les Libéraux politiques admettent les prémisses et nient la conséquence. Toutefois, ils accordent à l’État les mesures de répression, car il est bien convenu, et ils n’en démordent pas, que l’État est plus que l’individu et que sa vengeance, qu’il appelle peine ou châtiment, est légitime.

Le mot peine n’a de sens que s’il désigne la pénitence infligée au profanateur d’une chose sacrée. Celui qui tient une chose pour sacrée mérite évidemment qu’une peine lui soit infligée dès qu’il s’y attaque. Un homme qui épargne une vie humaine parce que