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Page:Stirner - L’Unique et sa propriété, trad. Reclaire, 1900.djvu/378

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s’en douter, c’est que la presse soit affranchie de l’État ou n’ait plus à compter avec lui. Le vœu conscient est une pétition que l’on adresse à l’État, la tendance inconsciente est une révolte contre l’État. L’humble supplique comme la ferme revendication du droit à la liberté de la presse supposent que l’État est le dispensateur, dont on ne peut espérer qu’un don, une concession, un octroi. Il se pourrait qu’un État fût assez fou pour accorder le cadeau demandé, mais il y a tout à parier que ceux qui le recevraient ne sauraient pas s’en servir, aussi longtemps qu’ils considéreraient l’État comme une vérité : ils se garderaient bien d’offenser cette « chose sacrée » et appelleraient sur celui qui se le permettrait les sévérités d’une loi sur la presse.

En un mot, il est impossible que la presse soit libre de ce dont je ne suis pas libre moi-même.

Ce que j’en dis va peut-être me faire passer pour un adversaire de la liberté de la presse ? Loin de là ! J’affirme seulement qu’on ne l’obtiendra jamais tant qu’on ne voudra qu’elle, la liberté de la presse, c’est-à-dire tant qu’on n’aura en vue qu’une permission limitée. Mendiez-la tant que vous voudrez, cette permission : vous l’attendrez éternellement, car il n’y a personne au monde qui puisse vous la donner. Tant que vous voudrez voir « légitimer, autoriser, justifier » par une permission (c’est-à-dire par la liberté de la presse) l’usage que vous faites de la presse, vous vivrez dans de vaines espérances et de vaines récriminations.

« Absurdité ! Vous qui nourrissez des pensées comme on en voit dans votre livre, vous ne parviendrez à leur donner de publicité que grâce à un heureux hasard ou à force d’artifices. Et c’est vous qui voulez vous opposer à ce qu’on harcèle, qu’on importune l’État jusqu’à ce qu’il accorde enfin la liberté d’imprimer ? »

Il se pourrait qu’un auteur à qui on tiendrait ce