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Page:Stirner - L’Unique et sa propriété, trad. Reclaire, 1900.djvu/60

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qu’ils cherchaient tous, c’était le calme et imperturbable désir de vivre, c’était la sérénité ; ils cherchaient à être « de bonnes choses ».

Les Stoïciens veulent réaliser l’idéal de la sagesse dans la vie, être des hommes qui savent vivre. Cet idéal, ils le trouvent dans le dédain du monde, dans une vie immobile et stagnante, isolée et nue, sans expansion, sans rapports cordiaux avec le monde. Le stoïque vit, mais il est seul à vivre : pour lui, tout le reste est mort. Les Épicuriens, au contraire, demandaient une vie active.

Les Anciens, en voulant être de bonnes choses, aspirent au bien vivre (les Juifs notamment désirent vivre longuement, comblés d’enfants et de richesses), à l’Eudémonie, au bien-être sous toutes ses formes. Démocrite, par exemple, vante la paix du cœur de celui « qui coule ses jours dans le repos, loin des agitations et des soucis ».

L’Ancien songe donc à traverser la vie sans encombre, en se garant des chances mauvaises et des hasards du monde. Comme il ne peut s’affranchir du monde, puisque toute son activité est tournée vers l’effort, il doit se borner à le repousser, mais son mépris ne le détruit pas ; aussi ne peut-il atteindre tout au plus qu’un haut degré d’affranchissement, et il n’y aura jamais, entre lui et le moins affranchi, qu’une différence de degré. Qu’il parvienne même à tuer en lui le dernier reste de sensibilité aux choses terrestres que trahit encore le monotone chuchotement du mot « Brahm », rien cependant ne le séparera essentiellement de l’homme des sens, de l’homme de la chair.

Le stoïcisme, la vertu virile même n’ont d’autre raison d’être que la nécessité de s’affirmer et de se soutenir envers et contre le monde ; l’éthique des stoïciens n’est point une doctrine de l’esprit, mais une doctrine du mépris du monde et de l’affirmation de soi vis-à-vis du monde. Et cette doctrine