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Page:Stirner - L’Unique et sa propriété, trad. Reclaire, 1900.djvu/88

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Philalèthes, des amis de la lumière, etc. ! Et cependant rien d’essentiel, de fondamental ne les sépare. Si l’on attaque telle ou telle des vieilles vérités traditionnelles (le miracle, le droit divin), les plus éclairés applaudissent, les vieux croyants sont seuls à gémir. Mais si l’on s’attaque à la vérité elle-même, aussitôt tous se retrouvent croyants, et on les a tous à dos. De même pour les choses de la morale : les bigots sont intolérants, les cerveaux éclairés se piquent d’être plus larges ; mais si quelqu’un s’avise de toucher à la Morale elle-même, tous font aussitôt cause commune contre lui. « Vérité, Morale, Droit » sont et doivent rester « sacrés ». Ce qu’on trouve à blâmer dans le Christianisme ne peut, disent les plus libéraux, qu’y avoir été introduit à tort et n’est point vraiment chrétien ; mais le Christianisme doit rester au-dessus de toute discussion, c’est la « base » immuable qu’il est « criminel » d’ébranler. L’hérétique contre la croyance pure n’est plus exposé, il est vrai, à la rage de persécution de jadis, mais celle-ci s’est tournée tout entière contre l’hérétique qui touche à la morale pure.



La Piété a eu depuis un siècle tant d’assauts à subir, elle a si souvent entendu reprocher à son essence surhumaine d’être tout bonnement « inhumaine », qu’on ne peut plus guère être tenté de s’attaquer à elle. Et cependant, si des adversaires se sont présentés pour la combattre, ce fut presque toujours au nom de la Morale elle-même, pour détrôner l’Être suprême au profit d’un — autre être suprême. Ainsi Proudhon n’hésite pas à dire : « Les hommes sont destinés à vivre sans religion, mais la morale est éternelle et absolue ; qui oserait aujourd’hui attaquer la