Page:Stirner - L’Unique et sa propriété.djvu/308

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« tribunaux de famille ». On y voit le père au nom « du conseil de famille » forcer le fils à s’engager et le chasser du milieu familial et par ce châtiment purifier la famille qu’il avait souillée. Le droit chinois développe cette responsabilité de la famille jusque dans ses conséquences extrêmes et fait expier à tous ses membres la faute d’un seul.

Aujourd’hui pourtant le bras de la famille ne s’étend pas assez loin pour pouvoir châtier sérieusement les apostats (l’État même empêche dans la plupart des cas l’exhérédation). Celui qui est criminel envers la famille se réfugie sur le domaine de l’État et est libre, comme celui qui est criminel contre l’État s’enfuit en Amérique pour n’être plus atteint par les lois de son pays. Celui qui a jeté la honte sur la famille, le fils dénaturé est protégé contre le châtiment des siens, parce que l’État, ce suzerain, enlève au châtiment familial « son caractère sacré » et le profane en décrétant qu’il n’est qu’une « vengeance » ; il empêche le châtiment, ce droit sacré de la famille, parce que, devant la sainteté de l’État, celle de la famille pâlit et perd sa consécration aussitôt qu’elle entre en conflit avec cette sainteté supérieure. S’il n’y a pas de conflit, l’État laisse subsister la sainteté inférieure de la famille ; mais, dans le cas contraire, il va jusqu’à ordonner le crime envers elle, quand, par exemple, il enjoint au fils de refuser obéissance aux parents dès qu’ils veulent l’entraîner à un crime contre l’État.

Aujourd’hui l’égoïste a brisé les liens de la famille et trouvé dans l’État un protecteur contre l’esprit de famille gravement atteint. Mais où est-il tombé maintenant ? Dans une nouvelle société où ces mêmes rets auxquels il vient d’échapper sont tendus à son égoïsme ;