Page:Stirner - L’Unique et sa propriété.djvu/307

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De même pour les hommes qui n’ont pas le sentiment de la famille. Ils ne sont pas exclus, mais ils s’excluent eux-mêmes, en estimant leur passion, leur volonté, au-dessus de l’union familiale.

Mais parfois le désir couve dans un cœur moins passionné et moins volontaire que celui de Juliette. L’amant s’offre sans résistance en sacrifice à la paix de la famille. On pourrait dire qu’ici encore l’intérêt personnel domine, car sa résolution vient de ce qu’elle trouve plus de satisfaction dans l’union de la famille que dans l’accomplissement de son désir. Peut-être ; pourtant, si l’on avait la certitude que l’égoïsme fût bien sacrifié à la piété ? Si le désir, qui était dirigé contre la paix de la famille, même après son sacrifice, demeure, dans le souvenir, un « holocauste » offert au lien sacré ? Si la docile créature était consciente d’avoir laissé insatisfaite sa volonté et de s’être soumise humblement à une puissance supérieure ? Soumise et sacrifiée parce que la superstition a exercé sur elle sa domination !

Ici l’égoïsme a vaincu, là triomphe la piété et le cœur égoïste saigne ; ici l’égoïsme était fort, là il est faible. Mais les faibles, nous le savons depuis longtemps, sont les désintéressés. Pour eux, les faibles, la famille a souci ; parce qu’ils appartiennent à la famille, ils ne s’appartiennent pas et n’ont pas le souci d’eux-mêmes. Hegel, par exemple, approuve cette faiblesse, quand il veut que le choix des époux soit laissé à la décision des parents.

La famille étant une communauté sainte à laquelle l’individu doit aussi obéissance, les fonctions de juge lui incombent aussi, par exemple, dans le Cabanis de Williblad Alexis, on trouve la description d’un de ces