Page:Stirner - L’Unique et sa propriété.djvu/353

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Le danger le plus redoutable pour l’État c’est que la valeur du moi vienne à apparaître, et il n’a pas de plus grand souci que de chercher à écarter toutes les occasions qui s’offrent à moi de me mette en valeur. Je suis l’ennemi mortel de l’État qui flotte constamment dans l’alternative : lui ou moi. C’est pourquoi il tient sévèrement la main à de que je ne me fasse pas valoir et même il cherche à refouler tout ce qui est mien. Dans l’État, il n’y a pas de propriété, c’est-à-dire pas de propriété de l’individu, il n’y a que propriété de l’État. Ce n’est que par l’État que j’ai ce que j’ai, que je suis ce que je suis. Ma propriété privée n’est que ce que l’État m’abandonne de la sienne, en rognant sur celle des autres membres de l’État : elle est propriété de l’État.

Mais, au contraire, en face de l’État, je sens toujours plus nettement qu’il me reste encore une grande force, le pouvoir sur moi-même, c’est-à-dire sur tout ce qui n’appartient qu’à moi et n’existe qu’en étant à moi en propre.

Que faire si mes voies ne sont plus ses voies, si mes pensées ne sont plus ses pensées ? Je m’en tiens à moi et ne lui demande rien ! Dans mes pensées que je ne soumets plus à la sanction d’une détermination, d’une autorisation, d’une grâce, j’ai ma propriété réelle, propriété dont je puis trafiquer. Car étant miennes ce sont mes créatures, et je suis en état de les céder pour d’autres pensées ; je les abandonne et les échange pour d’autres qui sont alors ma nouvelle propriété.

Ainsi qu’est-ce que Ma propriété ? Rien que ce qui est en ma puissance ! À quelle propriété ai-je droit ? À celle que je m’arroge ! Je me donne le droit de propriété en m’emparant de la propriété, en d’autres ter-