Page:Stirner - L’Unique et sa propriété.djvu/359

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Du principe de la bourgeoisie découle immédiatement la concurrence. N’est-elle pas autre chose que l’égalité ? Et l’égalité n’est-ce pas précisément une création de cette même révolution qui fut faite par la bourgeoisie ou la classe moyenne ? Comme il est permis à chacun de rivaliser avec tous dans l’État (le prince excepté parce qu’il représente l’État), de tâcher d’atteindre à leur hauteur, de les renverser et de les dépouiller à son propre profit, de les distancer et de déployer un effort supérieur pour leur ravir leur aisance, c’est là la preuve évidente que devant le tribunal de l’État chacun n’a que la valeur d’un « simple individu » et ne peut compter sur aucune faveur. Rivalisez entre vous à plaisir, renchérissez les uns sur les autres tant qu’il vous plaira, cela ne doit pas me toucher moi, l’État. Vous êtes libres de concourir entre vous, vous êtes des concurrents, c’est votre situation dans la société. Mais pour moi l’État vous n’êtes rien que de « simples individus »[1].

Ce qui avait été établi sous forme de principe ou de théorie comme l’égalité de tous, a trouvé précisément dans la concurrence, sa réalisation et son exécution pratique, car l’égalité c’est la concurrence libre. Tous devant l’État sont de simples individus, dans la société ou relativement les uns aux autres, ils sont concurrents.

Je n’ai besoin de rien de plus que d’être un simple individu et de pouvoir concourir avec tout autre, à l’exception du prince et des siens, liberté impossible anté-

  1. Le ministre Stein employa cette expression à l’égard du comte de Reisach quand froidement il livra celui-ci au gouvernement bavarois, « car, disait-il, un gouvernement comme la Bavière doit valoir plus qu’un simple individu ». Reisach avait sur l’ordre de Stein écrit contre Montgelas. Pour cet écrit Montgelas exigea l’extradition de Reisach que Stein accorda aussitôt.