Page:Stirner - L’Unique et sa propriété.djvu/429

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L’État s’efforce de dompter l’homme cupide, en d’autres termes il cherche à diriger ses convoitises exclusivement sur lui-même et à les satisfaire avec ce qu’il leur offre. Il ne lui vient pas à l’idée de les assouvir par amour pour celui qui les manifeste, au contraire, il traite d’« égoïste » l’homme qui exhale des passions effrénées, et « l’homme égoïste » est son ennemi. C’est l’ennemi de l’État parce que le moyen d’en venir à bout lui échappe. L’État ne peut « saisir » l’égoïste. L’État ne s’inquiétant que de lui-même, ce qui d’ailleurs ne peut être autrement, il s’ensuit qu’il n’a pas souci de mes besoins, il ne songe qu’à la façon dont il me tuera, c’est-à-dire fera de moi un autre moi, un bon citoyen. Il crée des institutions destinées à « améliorer les mœurs ». Et avec quoi gagnera-t-il les individus ? Avec soi-même, c’est-à-dire avec ce qui est propre à l’État, avec la propriété de l’État. Il emploiera une activité incessante à les faire participer à tous ses « biens », à leur procurer à tous « les biens de la civilisation » : il leur donne son éducation, leur ouvre ses institutions et les met en mesure d’atteindre à la propriété, c’est-à-dire au fief par les voies de l’industrie, et en retour de ce fief il n’exige que le juste intérêt d’une constante reconnaissance. Mais les « ingrats » oublient de le remercier. La « société » qui est d’essence tout autre que l’État n’y réussit pas non plus.

Dans l’association tu apportes ta puissance totale, tous tes moyens, et tu te fais valoir ; dans la société, tu es employé avec ta force de travail ; dans celle-là tu vis en égoïste, dans celle-ci en humain, en être religieux ; tu es « comme un membre au corps du Maître » ; tu dois à la société ce que tu as, tu es obligé envers