Page:Stirner - L’Unique et sa propriété.djvu/438

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de moi ». C’est ainsi seulement que le monde me satisfait, tandis qu’au point de vue religieux et j’y comprends le point de vue moral et humain ; il est caractéristique que tout reste un rêve pieux (pium desiderium), c’est-à-dire jusqu’ici inaccessible. — Ainsi : la félicité universelle des hommes, le monde moral d’un amour universel, la paix éternelle, la fin de l’égoïsme, etc. — « Rien n’est parfait dans ce monde. » Avec ces tristes paroles les bons en prennent congé et se réfugient dans leur chambre ou dans leur fière « conscience ». Mais nous, nous demeurons dans ce monde « imparfait » parce que nous pouvons l’employer aussi à notre jouissance personnelle.

Mon commerce avec le monde consiste à en jouir et à en tirer parti pour ma satisfaction personnelle. Ce commerce se ramène à ma jouissance personnelle.


3. — MA JOUISSANCE PERSONNELLE


Nous sommes au seuil d’une époque. Jusqu’ici le monde existant ne pensait qu’à profiter du gain de la vie, n’avait souci que de la vie. Car, que toute l’activité soit tendue vers la vie d’au-delà ou de la vie d’ici-bas, la vie temporelle ou l’éternelle, qu’on soupire après le pain quotidien (« Donnez-nous notre pain quotidien ») ou après le « pain céleste » (« le vrai pain du Ciel ») ; « le pain de Dieu qui vient du Ciel et donne la vie au monde » ; « le pain de la vie » (Saint-Jean) ; que l’on se soucie « de cette chère existence » ou de « la vie dans l’éternité », cela ne change pas le but de la tension ou du souci qui, dans l’un comme dans l’autre cas, se manifeste comme étant la vie. Les tendances modernes