Page:Stirner - L’Unique et sa propriété.djvu/470

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

la pensée. Ici la vérité est déjà trouvée et existante, mais je dois la tenir de la faveur du distributeur ; là, la vérité est à chercher, le but vers lequel il me faut courir réside dans l’avenir mais il est à moi.

Dans les deux cas la vérité (la vraie pensée) réside hors de moi et j’aspire à l’obtenir, que ce soit comme présent (par la grâce), que ce soit par acquisition (par mon mérite personnel). Ainsi, dans le premier cas, la vérité est un privilège, dans le second au contraire sa voie est patente à tous, et ni la Bible, ni le Saint-Père, ni l’Église, ni qui que ce soit n’est en possession de la vérité ; mais on peut la gagner par la spéculation.

Ainsi ni les uns ni les autres n’ont la vérité en propriété ; ou bien ils l’ont en fief (car le Saint-Père par exemple n’est pas un individu ; comme l’individu il est Sixte, Clément, etc., mais ce n’est pas Sixte, Clément, etc., c’est le Saint-Père, c’est-à-dire un esprit qui a la vérité) ou bien ils l’ont comme idéal. Comme fief elle n’est que pour quelques-uns (privilégiés), comme idéal, elle est à tous (patentée).

Liberté de penser a donc pour sens que nous marchons tous dans l’obscurité sur la route de l’erreur, mais que chacun peut sur cette voie s’approcher de la vérité et par conséquent est dans la bonne voie (tout chemin mène à Rome, au bout du monde, etc.) Liberté de penser signifie par suite que la vraie pensée ne m’est pas propre, car si elle était telle comment pourrait-on m’en exclure ?

La pensée est devenue tout à fait libre et a établi une masse de vérités auxquelles je dois acquiescer. Elle cherche à s’achever en un système et à se donner une « constitution » absolue. Dans l’État, par exemple, elle est en quelque sorte à la recherche de l’idée jusqu’à ce