Page:Stirner - L’Unique et sa propriété.djvu/57

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Le christianisme suit une marche analogue à celle de l’antiquité : jusqu’à la veille de la Réforme l’intelligence demeure sous la domination des dogmes chrétiens, mais dans le siècle qui précède, elle se lève dans une attitude sophistique et joue avec tous les articles de foi un jeu hérétique. On disait couramment en Italie et principalement à la cour romaine : pourvu que le cœur demeure chrétien, on peut laisser la raison à ses fantaisies.

On était tellement habitué longtemps avant la Réforme aux querelles scolastiques que le pape et nombre d’autres avec lui, prirent au début la révolte de Luther pour une querelle de moines. L’humanisme correspond à la sophistique et de même qu’au temps des sophistes, la vie grecque était en plein épanouissement (siècle de Périclès) de même l’époque de l’humanisme ou comme on pourrait le dire encore du Machiavélisme (l’imprimerie, la découverte du Nouveau-Monde, etc.) fut brillante entre toutes. Le cœur alors était bien loin encore de vouloir se débarrasser de son contenu chrétien.

Comme Socrate, la Réforme prit le cœur au sérieux et on le vit se déchristianiser à vue d’œil. Il allait être bientôt délivré de l’accablant fardeau du christianisme. De jour en jour moins chrétien, le cœur perd la substance sur laquelle il travaille, il ne lui reste qu’une cordialité vide, un amour très général de l’humanité, l’amour des hommes, la conscience de la liberté et « la conscience de soi ».

C’est maintenant seulement que le christianisme est révolu parce que, maintenant, il est dénudé, mort et vide. Le cœur ne s’ouvre plus, ne se laisse plus envahir par rien, il rejette même ce qui pourrait se glisser en