Page:Stirner - L’Unique et sa propriété.djvu/64

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céder l’esprit devant la personnalité et songe à soi quand tu voudrais le voir agir par amour pour une idée. Vous vous distinguez toi et lui en ce sens que tu prends l’idée pour centre, alors qu’il se prend lui-même comme point central, ou bien que tu coupes ton moi en deux et investis ton « moi propre », l’esprit, de la domination sure le reste de valeur moindre, tandis que lui ne veut rien savoir de cette scission et poursuit des intérêts tant spirituels que matériels absolument à sa guise. Tu penses seulement à jeter l’anathème sur ceux qui ne conçoivent aucun intérêt spirituel, en réalité, tes imprécations atteignent tous ceux qui ne considèrent pas les intérêts de l’esprit comme étant ce qu’il y a en eux de plus vrai et de plus haut. Pour cette beauté, tu pousses la chevalerie si loin que tu vas jusqu’à affirmer qu’elle est dans le monde l’unique beauté. Tu ne vis pas pour toi, mais pour ton esprit et pour ce qui appartient à l’esprit, c’est-à-dire pour des idées.

Comme l’esprit n’existe qu’autant qu’il crée de l’esprit, examinons un peu sa première création. Aussitôt cette première création accomplie, il s’ensuit une reproduction naturelle des créatures, de même que dans le mythe de la création, les premiers hommes seulement durent être créés, le reste de l’espèce se propagea de soi-même. Au contraire, la première créature doit sortir « de rien », pour la réaliser l’esprit n’a que soi-même, ou plutôt il ne se possède pas encore, mais il doit se créer : par conséquent sa première création est soi-même, l’esprit. Si mystique que cela paraisse nous en faisons pourtant l’expérience tous les jours. Es-tu un penseur avant de penser ? En créant la première pensée, tu te crées penseur ; car tu ne penses pas avant que tu