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Grétry, de même qu’une infinité de compositeurs, n’a eu recours à ces diverses voix de l’orchestre, que par échappées insignifiantes. Ici une ritournelle, là un trait d’accompagnement passager, ailleurs une entrée banale.

L’analogie philosophique de ces voix n’a été, en thèse générale, qu’entrevue seulement.

Wagner en a fait des types, où les caractères s’incrustent et s’incarnent.

Il ne s’agit plus, pour ces instruments, de se borner à traduire simplement l’impulsion du cœur, les impressions de l’âme. Il faut qu’ils deviennent une synthèse vivante, correspondant à une situation, à un épisode, qui fera du personnage un ange ou un monstre, dès les premières mesures entendues.

L’instrument-type suivra pas à pas ce personnage à travers les péripéties du drame, et

    le rôle pittoresque et même philosophique du hautbois, remplaçant la cornemuse, est étudié de façon à faire du chef-d’œuvre de Rossini, les ranz helvétiques aidant, un bouquet de thèmes agrestes d’un parfum exquis. Le motif générateur dessine la couleur locale, assiste à la conspiration, participe au combat et préside au triomphe. C’est, avec les timbres âpres et caractéristiques du Freyschütz, le plus grand effort du génie psychologico-instrumental moderne, avant Wagner.