Page:Strauss David - Vie de Jésus, tome 1, Ladrange 1856.djvu/317

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Luc. Enfin il ajoute qu’il n’y peut voir une fiction soit accidentelle, soit préméditée, parce qu’il aurait été trop facile aux chrétiens de cette localité de s’en enquérir auprès de Marie ou des apôtres ; mais c’est trop parler dans le style des anciens apologistes, et c’est supposer que ces personnages, en vertu d’une ubiquité dont il a été question dans l’Introduction, auraient pu être présents dans tous les lieux où une tendance à la formation des légendes chrétiennes se faisait sentir.

La notice de la circoncision de Jésus, Luc, 2, 21, provient évidemment de quelqu’un qui, sans avoir de renseignement réel sur cette scène, regarda comme certain, conformément à la coutume juive, que cette cérémonie se fit ainsi que d’ordinaire, le huitième jour après la naissance, et qui voulut signaler, chez Jésus, ce moment de la vie d’un enfant israélite. Paul (Phil. 3, 5)[1], de la même façon, s’était vanté de sa circoncision au huitième jour, περιτομῇ ὀκταήμερος. Tandis que cette cérémonie sert, dans la vie de Jean-Baptiste, de texte à une description étendue et ornée (1, 59 seq.), elle est traitée ici pour Jésus avec sécheresse et brièveté. Ce contraste frappant a fait dire à Schleiermacher, peut-être avec raison, que du moins ici l’auteur du chapitre premier n’est plus le rédacteur. Les choses étant ainsi, nous n’avons à apprendre, dans le récit de la circoncision, rien qui importée notre but, si ce n’est une observation sur la prétendue détermination du nom de Jésus dès avant sa naissance ; nous pouvions déjà savoir, mais nous n’avions pas encore eu l’occasion de remarquer expressément, que cette détermination fait partie de l’enveloppe mythique de tout le récit. Il est dit dans notre verset que le nom de Jésus fut fixé par l’ange avant qu’il fût conçu dans le ventre de sa mère, κληθὲν ὑπὸ τοῦ ἀγγέλου πρὸ τοῦ συλ-

  1. Peut-être par précaution, et pour prévenir les objections des Juifs ? (Ammon, Fortbildung, 1, S. 217.)