Page:Strauss David - Vie de Jésus, tome 1, Ladrange 1856.djvu/338

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peut-être, avait fait périr vers la même époque, mais pour d’autres causes, quelques familles à Bethléem ; il se peut aussi que Jésus soit allé plus tard en Égypte pour d’autres motifs[1].

Dans cette explication, ainsi que dans l’explication purement naturelle, restent toujours, comme autant de faits, l’arrivée de quelques Orientaux, la fuite en Égypte et le massacre de Bethléem ; seulement ces faits sont dépouillés de l’enveloppe merveilleuse dont le récit évangélique les a entourés. On les suppose intelligibles de cette façon, et l’on pense qu’ils peuvent bien être arrivés réellement ; mais en vérité ils deviennent plus incompréhensibles que dans l’explication orthodoxe elle-même : car, en les privant de leur enveloppe miraculeuse, on les prive en même temps de tout ce qui les motivait, et toute base leur manque. La relation qui s’établit entre les Orientaux et les parents de Jésus est complètement motivée dans le récit de Matthieu, mais d’après l’explication demi-naturelle ce n’est plus qu’un hasard singulier. Le massacre de Bethléem a, dans le récit évangélique une cause précise ; ici on ne comprend plus qu’Hérode en vienne à l’ordonner. De même, la fuite de Jésus en Égypte est nécessitée par des circonstances urgentes dans Matthieu ; ici elle devient tout à fait inexplicable. À la vérité on peut dire : Ces événements ont eu leurs causes suffisantes dans la réalité ; seulement Matthieu en a caché l’enchaînement naturel, et a substitué, en place, un enchaînement miraculeux. Mais, si l’écrivain ou la légende est capable d’entourer les événements de motifs et de circonstances accessoires tout à fait fausses, l’écrivain ou la légende est également capable d’inventer les événements eux-mêmes ; et cette invention est d’autant plus vraisemblable que l’on

  1. Sur l’explication des récits de miracles d’après le mode de leur formation, dans Henke’s Museum, 1, 3, 399 ff. De pareilles explications se trouvent dans le Mémoire sur les deux premiers chapitres de Matthieu et de Luc, dans Henke’s Magazin, 5, 1, 171 ff., et dans Matthæi, Religionsgl. der Apostel, 2, S. 422 ff.