Page:Strauss David - Vie de Jésus, tome 1, Ladrange 1856.djvu/435

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Cela exécuté rapidement et non sans violence extérieure ; et, comme malgré le temps qui s’écoulait Jésus ne s’engageait pas dans cette entreprise, Jean put, à la fin, douter qu’il eût eu raison de le tenir pour le Messie. Mais il ne le pouvait pas s’il avait appris d’une manière digne de foi les miracles de la conception et de la naissance de Jésus (de cela il a été question plus haut) ; il ne le pouvait pas si, lors du baptême, Jésus lui avait été désigné comme le Messie par une apparition et une voix céleste (et de cela il sera question plus tard) ; il ne le pouvait pas non plus s’il voyait en Jésus, d’après le quatrième évangile, un être supérieur descendu du ciel et le Messie destiné à expier, par ses souffrances, les péchés de l’humanité (et de cela je vais parler immédiatement). Si donc Jean-Baptiste, du moment qu’on suppose qu’il a eu cette dernière idée sur Jésus, n’a pu le faire interroger de la manière indiquée, et vice versa, il faut examiner isolément chacune des deux circonstances inconciliables, et voir quelle est celle que l’on doit abandonner et quelle est celle que l’on doit conserver. Prenant d’abord les déclarations de Jean-Baptiste sur la messianité de Jésus dans le quatrième évangile, nous avons sur ce point à distinguer deux questions : en premier lieu est-il concevable que Jean ait eu effectivement une pareille idée du Messie ? en second lieu est-il vraisemblable qu’il ait cru cette idée réalisée dans la personne de Jésus ? Quant au premier point, un des caractères de l’idée que Jean-Baptiste se fait du Messie d’après le quatrième évangile, c’est que le Messie est un être supérieur venu du ciel, ἐκ τοῦ οὐρανοῦ ἐρχόμενος, et en conséquence placé au-dessus de tous, ἐπάνω πάντων ἐστὶ (3, 31). Dans l’expression : il était avant moi, πρῶτός μου ἦν (1, 15, 27, 30), Neander et de Wette ne veulent plus trouver que la priorité de l’être. Mais, quand bien même ces mots renfermeraient la préexistence du Messie, on a, au plus, besoin d’admettre,