Page:Strauss David - Vie de Jésus, tome 1, Ladrange 1856.djvu/461

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être présentée à table même ; il paraît donc y avoir là une contradiction. Fritzche a essayé de la résoudre en faisant remarquer que dans les évangiles il n’est pas dit que la tête de Jean eût été apportée pendant que le repas durait encore ; mais sa conciliation n’est pas bonne, car la fille d’Hérodias demanda la tête ainsi, ὧδε, c’est-à-dire à l’instant même et pendant la fête[1], et à la suite du récit, particulièrement dans Marc, où aussitôt un garde, speculator, va dans la prison et revient avec la tête de Jean-Baptiste sur le plateau, πίναξ, porte à croire que son désir ou plutôt celui de sa mère fut accompli, et qu’à cette femme vindicative fut présentée, à table même, la tête de son ennemi comme le plat le plus recherché. Cependant une conciliation du moins possible se trouve dans un renseignement que nous donne Josèphe[2], c’est qu’à ce moment Hérode-Antipas était en guerre avec le roi arabe Arétas, et que la place forte de Machærus était située sur la limite, entre son territoire et celui de ce prince ; par conséquent il se pourrait qu’Hérode se fût alors tenu avec sa cour à Machærus[3].

En résumé, la vie de Jean, dans le récit évangélique, est, par des motifs faciles à concevoir, entourée d’un reflet mythique, surtout du côté par où elle se rattache à Jésus, tandis que l’autre côté a mieux conservé les contours historiques.




  1. Comp. De Wette, Exeg. Handb., 1, 1, S. 132.
  2. Antiq., 18, 5, 1. Comparez Kern, Faits principaux, etc. Tüb. Zeitschrift, 1836, 2, S. 60.
  3. Osiander (S. 140) sait, à la vérité, de source certaine qu’Hérode avait alors sa cour à Machærus ; mais, tant qu’il ne nous dira pas où il l’a appris, nous serons obligés de nous en tenir à notre simple possibilité.