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Page:Stuart Merrill - Prose et vers (1925).pdf/157

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taire, un libraire du passage du Havre. Il ne fit pas d’enquête, sachant fort bien que nous étions solidaires les uns des autres, et que, s’il sévissait trop durement, il risquait de perdre ses meilleurs élèves et quelques prix et accessits au Concours général. L’orage passa et le Fou reparut.

Cet illustre journal ne suffisait pas à notre activité. Nous fondâmes un cercle littéraire, les Moineaux Francs, qui tenait ses assises tous les jeudis dans le salon d’un hôtel borgne de la rue de la Victoire. On y lisait des vers, on y causait du livre du jour, et on y vénérait l’ami Fontainas qui venait de publier son premier poème dans la Jeune Belgique. La cotisation mensuelle était fixée à un franc. Mais nous ne possédions pas toujours ces vingt sous, et nous dûmes déguerpir de la rue de la Victoire en laissant une petite dette au patron de l’hôtel, tout comme à ce pauvre M. Schouster-Van Hommeslager. La dernière réunion du cercle eut lieu en plein air, au Parc Monceau. Malheureusement une aguichante nourrice y démoralisa complètement notre trésorier qui disparut avec les quarante-cinq sous de la caisse. Il est devenu, depuis, un anarchiste distingué.

Le moment est venu de raconter une petite anecdote que je pourrais intituler : Comment je ne vis pas Victor Hugo.