Aller au contenu

Page:Stuart Merrill - Prose et vers (1925).pdf/156

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de poèmes en prose de Bonin, de barcarolles de votre serviteur. René Ghil y insérait des vers brûlants à l’adresse de Mlle Marguerite Ugalde, qu’il avait vue aux Nouveautés et qu’il adorait de loin, oh ! de bien loin ! Éphraïm Mikhaël s’y distingua par une Ballade à la concierge de mon cousin, laquelle avait offensé sa jeune dignité de poète. Quant à Guillaumet, il rédigeait à lui seul la moitié du journal, car il était d’une fécondité inépuisable. Quand il descendait de classe, il avait coutume de me demander d’un air fier : « Devine combien j’ai fait de sonnets en deux heures ? » Moi qui, pendant ce laps de temps, avait péniblement accouché d’un quatrain, je hasardais : « Un sonnet et demi ? » — « Non, mon vieux, dix-sept ! ».

Les choses faillirent tourner mal pour nous. Un journal de ce temps, Le Petit Moniteur Universel, s’occupa du Fou dans un article intitulé : Littérature de Potaches. On y reproduisait un sonnet naturaliste de moi, Le Gourmand, et, si j’ai bonne mémoire, un sonnet de Quillard qui débutait par cet impeccable alexandrin :

Un lendemain de fête on a mal aux cheveux.

On ne fut pas loin de nous traiter de Pétrones du lycée Fontanes. Le proviseur s’émut et interdit la vente du Fou chez notre unique déposi-