Aller au contenu

Page:Stuart Merrill - Prose et vers (1925).pdf/275

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de ses mains, ni les baisers de la plus belle bouche du monde. Tu comprends que ce n’est pas toi, vieux grigou de patron, qui me consoleras. Et puis tu es trop bête. Tu t’asseois devant le piano, tu soupires, tu allonges un nez d’une aune, et puis c’est tout. Elle au moins savait éveiller l’âme du piano ; à moins que ce ne fussent ses propres doigts qui chantaient. Je ne sais au juste. Mais je sais que lorsqu’elle jouait, j’aimais bien m’asseoir sur mon derrière et considérer le divin mouvement de ses paupières levées vers la musique puis baissées vers les touches. Et mon âme jaillissait vers le paradis des chats, et je me sentais devenir je ne sais quoi, quelque chose de bien supérieur à la boule de poils que je suis, une flamme, une fleur, un parfum. Patron, je vois que tu as envie de pleurer. Je te donne donc la patte et je te mordille l’oreille pour te consoler. Je te reconnais au moins une qualité : c’est que tu aimes mon amie. »

Là-dessus Bérénice s’est tue, méditative.

Quand vous reverrai-je ? Je voudrais bien aller à B. J’ai supplié L. d’attraper le choléra ou la variole pour que je sois forcé de l’accompagner jusqu’à F. Mais il est affreusement égoïste et a refusé de me rendre ce service. C’est égal je n’y tiens plus et j’ai bien envie d’aller vous surprendre à moins que vous n’ayez la bonne idée de