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Page:Stuart Merrill - Prose et vers (1925).pdf/74

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tremblent, encore lourdes de rosée, sur leur tige.

Et ceux-ci ont pu, contre un baiser, orner vos doigts de bagues…

Mais moi, pour avoir baisé la trace de vos pas, je vous offre un sacrifice qui est plus précieux que les fleurs les plus rares et les joyaux,… ma gloire !

Et vous ne saurez jamais quel poète chante et sanglote en ces strophes, ni vers quelle femme aspirent mon âme et ma chair. Mais écoutez : vous avez un signe secret au-dessous du cœur, où les baisers sont les meilleurs. Comprenez-vous ?

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Ne demande pas, ô bien-aimée, à tous les poètes, d’aimer de la même façon. Dante vit la face de Béatrice dans les flammes blanches du Paradis, et l’adora comme on adore les saintes qui sont mortes à jamais. Pétrarque, au bord de la fontaine de Vaucluse, pleura sa Laure comme on pleure un rêve que les mains mortelles ne peuvent réaliser. Henri Heine sanglota de tendresse et de rage dans le sang et les roses, et les hommes ne savent pas s’il haïssait plus son amour qu’il n’aima sa haine.

Ô bien aimée, les poètes n’aiment pas tous de