Page:Stupuy - Henri Brisson, 1883.djvu/28

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vous fera iront droit au point important de l’affaire ; jamais entretien de consultant ne vous rassura plus promptement et davantage ; vous sentez vous-même qu’il est inutile d’insister auprès d’une raison si sûre et si pénétrante. Bien qu’il ait fondé sa réputation au barreau de Bordeaux, M. Dufaure n’a point la faconde brillante et sonore, entraînante et trop souvent vide des beaux parleurs bordelais. Il n’a pas non plus leur admirable organe, cette voix qui vous enchante avant de vous convaincre. Il parle du nez, disons-le sans détour, et la première impression, l’impression physique produite sur le nerf auditif, est positivement désagréable… Cinq minutes à peine se sont écoulées, et l’orateur s’est tellement emparé de votre raison, que le défaut de l’organe vous échappe ; il semble même en harmonie avec la personne et la dialectique formidable de M. Dufaure ; ce n’est plus que le bruit naturel de ces molaires d’airain qui broient impitoyablement l’adversaire. La parole est sobre et sévère, l’argumentation achevée, le hors-d’œuvre banni. Ses plaidoyers et ses discours sont des modèles de disposition et de lumière ; tout y est ordonné, prévu, mis en place ; tout y concourt à la démonstration, à la conclusion, avec une rigueur mathématique qui donne l’idée de ces machines savantes dont les rouages successifs se transmettent régulièrement la matière à transformer, et ne s’arrêtent que lorsque le produit est à l’état de perfection.

Nommé vice-président, puis rapporteur de la Commission chargée de faire une enquête sur les élections des 14 et 28 octobre 1877, Brisson demanda la mise en accusation des ministres du 16 mai. On a contesté la convenance politique de cette résolution qui, d’ailleurs, n’a point été admise ; mais il faut reconnaître que les conclusions du rapport étaient légitimes : la