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Page:Suétone - Les écrivains de l’Histoire Auguste, 1845.djvu/356

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nations étrangères, quoiqu’il eût toujours recherché la paix ; et il répétait souvent ce mot de Scipion : « Qu’il aimait mieux conserver un seul citoyen que de tuer mille ennemis. »

X.

Le sénat avait décrété que les mois de septembre et d’octobre seraient appelés Antonien et Faustinien ; mais il s’y refusa. Il célébra avec une grande magnificence le mariage de sa fille Faustine avec Marc Antonin, et il accorda même, à cette occasion, un donatif aux soldats. Il nomma Vérus Antonin consul après sa questure. Il avait fait venir de Chalcis le philosophe Apollonius, et l’avait mandé au palais de Tibère, où il habitait, pour lui confier l’éducation de Marc Antonin. Le philosophe lui ayant dit « que ce n’était pas au maître à aller trouver le disciple, mais au disciple à venir trouver le maître, » Antonin lui répondit en riant : « Il a été plus facile à Apollonius de venir de Chalcis à Rome que de sa maison dans ce palais. » Il remarqua aussi sa cupidité dans la question des honoraires. Une preuve, entre autres, de la bonté d’Antonin, c’est que, voyant Marcus pleurer la mort de son gouverneur, et les courtisans l’empêcher d’en témoigner son chagrin, il leur dit : « Permettez-lui d’être homme : ni la philosophie ni le diadème ne détruisent les affections. »

Il enrichit ses préfets et les gratifia des ornements consulaires. S’il condamna quelques citoyens pour crime de concussion, il rendit leur patrimoineà leurs enfants, mais à la charge de restituer aux provinces ce qui leur avait été extorqué. Il se montra toujours très disposé à faire grâce. Il donna des jeux dans lesquels on vit des éléphants, des léocrocottes, des strepsicérotes, des crocodiles, des hippopotames, des tigres, et une infinité d’animaux tirés de toutes les contrées de la terre. Il fit aussi lâcher cent lions à la fois.

XI.

Sur le trône, il ne se conduisit pas autrement avec ses amis qu’il n’avait fait avant d’y monter. Aussi n’eurent-ils jamais recours, pour trafiquer de leur crédit, à l’entremise de ses affranchis, envers lesquels il était fort sévère. Il aima le talent des acteurs : ses plus grands plaisirs étaient la pêche, la chasse, la promenade avec ses amis et la conversation. Il passait avec eux, comme un simple particulier, le temps des vendanges. Il accorda, dans toutes les provinces, des distinctions et des appointements aux rhéteurs et aux philosophes. Quelques écrivains attribuent à d’autres les discours publiés sous son nom ; mais Marius Maximus prétend qu’ils sont bien de lui. Ses amis étaient invités àses repas particuliers ou publics. Jamais il ne se fit suppléer pour un sacrifice, à moins qu’il ne fût malade. Quand il sollicitait des dignités pour lui ou pour ses fils, il le faisait comme les autres citoyens. Lui-même assista souvent aux festins de ses amis. Entre autres preuves manifestes de la douceur de son caractère, on cite le trait suivant : Il s’était rendu chez Omulus, et, frappé de la beauté de certaines colonnes de porphyre, il lui demanda d’où il les avait tirées ; à quoi Omulus répondit : « Quand tu entres dans la maison d’autrui, sois muet et sourd » ; plaisanterie que le prince prit fort bien, comme il prenait d’ailleurs toutes celles d’Omulus.

XII.

Il s’occupa beaucoup de la jurisprudence, aidé des lumières de Vinidius Vérus, de Salvius Valens, de Volusius Métianus, d’Ulpius Marcellus,