Page:Suétone - Les écrivains de l’Histoire Auguste, 1845.djvu/384

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On a même une lettre de cette impératrice à son mari, dans laquelle elle l’exhorte à tirer une vengeance éclatante de ce rebelle. Voici ses termes : « J’arriverai demain, comme vous me l’ordonnez, à Albanum. Permettez, en attendant, que je vous conjure, si vous aimez vos enfants, de poursuivre rigoureusement ces révoltés. Le mauvais exemple peut gagner les chefs et les soldats, qui, s’ils ne sont réprimés, deviennent bientôt oppresseurs. »

X.

On lit, dans une autre lettre de Faustine à Marc-Aurèle : « Ma mère Faustine a exhorté aussi votre père Antonin le Pieux, après la révolte de Celsus, à considérer ce qu’il devait à sa famille et à l’état. Car ce n’est pas être un bon prince que de ne songer ni à son épouse ni à ses enfants. Considérez l’extrême jeunesse de notre fils Commode. Pompéien, notre gendre, est vieux, et presque étranger à Rome. Voyez donc ce que vous devez décider à l’égard de Cassius et de ses complices. Gardez-vous de pardonner à des hommes qui ne vous ont pas ménagé, et qui ne feraient grâce ni à moi ni à nos enfants, s’ils étaient vainqueurs. Je vous suivrai bientôt. L’indisposition de notre Fadilla m’a empêchée de me rendre à Formium. Si je ne vous y trouve plus, j’irai jusqu’à Capoue : cette ville conviendra peut-être à la santé de nos enfants et à la mienne. Je vous prie d’envoyer à Formium le médecin Sotéride ; car je n’ai point de confiance en Pisithée, qui n’apporte aucun soulagement à ma fille. Calphurnius m’a remis vos lettres bien cachetées ; j’y répondrai, si je tarde à vous rejoindre, par le vieux eunuque Cécilius : c’est, vous le savez, un homme sûr. Je lui répéterai de vive voix les propos que la femme de Cassius, ses fils et son gendre, tiennent, dit-on, sur votre compte. »

XI.

On voit par cette lettre que Faustine n’était pas complice de Cassius, puisqu’elle insistait pour qu’il fût sévèrement puni, puisqu’elle représentait à Marc-Aurèle, qui penchait vers la clémence, la nécessité d’une vengeance terrible. Voici maintenant ce que lui répondit l’empereur : « Vous prenez vivement à cœur, ma chère Faustine, les intérêts de votre époux et de nos enfants. J’ai relu à Formium la lettre dans laquelle vous m’exhortez à punir les complices de Cassius. Mais je suis décidé à faire grâce à ses enfants, à son gendre, et à sa femme ; j’écrirai même au sénat de ne prononcer ni une confiscation trop forte, ni une peine trop sévère. Rien ne fait plus d’honneur que la clémence à un empereur romain. C’est cette vertu qui a élevé César au rang des dieux, qui a consacré la mémoire d’Auguste, qui a mérité à votre père le nom de Pieux. En un mot, si l’on avait suivi mon conseil pour cette guerre, Cassius vivrait encore. Soyez donc sans inquiétude : les dieux me protègent, et ma piété les touche. J’ai désigné notre gendre Pompéien consul pour l’année prochaine. » Telle fut la réponse de Marc-Aurèle à son épouse.

XII.

On pourra juger aussi, par les extraits suivants, du discours qu’il envoya, dans cette circonstance, au sénat : « En échange de vos félicitations sur la dernière victoire, je vous donne, pères conscrits, mon gendre Pompéien pour consul. Son âge lui aurait valu depuis longtemps