Page:Suarès - Debussy, 1922.djvu/86

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succèdent et toutes les nuances, les éclats terribles de la jalousie et les soudains apaisements du tigre, qui se retient, qui guette et fait patte de velours ; la rage qui se contracte, le contraste de la violence la plus sauvage et de la plus douce innocence ; le scherzo de l’enfant et la fureur de l’homme, sa douleur qui ricane, ses grincements de dents jusqu’à l’explosion finale, le musicien conduit la tragédie avec une puissance qu’on ne saurait dépasser. Je compare de tels moments aux conflits les plus formidables de la Gœtterdæmmerung, cette catastrophe musicale, et l’avantage n’est pas toujours aux géants : le comble de la puissance est dans le caractère et l’émotion, non dans la masse, le tonnerre et les orages ; la massue d’Hercule me touche moins que les petites mains de Cordélia.