Page:Suarès - Images de la grandeur.djvu/205

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NUIT POLAIRE


I. Ni ici, ni là, ni ailleurs,

Ni ciel, ni mer, ni terre, —

Point d’aube, point de soir, point de jour : une nuit infinie.

II. La glace livide luit dans le fourreau de l'ombre, comme l’acier du meurtre sous une couette de paille.

La brume a ooyé toutes les étoiles, et son gouffre étouffant a bu toute clarté. .

Ténèbres de l’ame, — ténèbres, hélas, ténèbres de la vie.

III. Ni repos, ni le luxe de la volupté, ni sommeil sur le sein d’une femme,

Ni la fourrure des baisers, ni les tièdes dentelles des lèvres sur les lèvres,

Ni le fuseau des regards tendres qui file, pour le cœur, un long voile d’oubli. .

IV. Froid, froid, froid.

Le monde est un linceul sur mon ame,

Comme un marais de brouillard suspendu qui colle aux os.

Comme un suaire humide, qui mord la chair par chaque pore, qui la roidit, qui vitrifie l’haleine sur la bouche ouverte pour la respira- lion. .

Ténèbres de ma vie, hélas, ténèbres glaciales.

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