Page:Suarès - Sur la mort de mon frère.djvu/173

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l’hélice battante, des sifflets ; nuit et jour, sur la tête, le tumulte des pas et des armes ; à la porte, là, dans le couloir et comme à son oreille, les appels, le va et vient des matelots, le tintement métallique des outils et de toute la carapace, le ronflement de la machine et le grincement des chaînes ; dix-sept jours sur la mer orageuse, qui joue à la balle avec le bateau de guerre et le blessé à bord. Mais il n’a pas eu une plainte. À Kobé, dans la fièvre même, il n’a pensé qu’au frère, là-bas, innocent de cette douleur encore ; il en a pressenti les angoisses, si la lettre attendue n’arrivait pas au jour dit ; et, dans une demi-hallucination, un demi-évanouissement, il a trouvé la force d’écrire : un seul mot, au crayon, où il s’excuse presque de négligence, où il ne révèle par rien le péril couru, ni le mal souffert. Tel