Page:Suarès - Sur la mort de mon frère.djvu/190

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Connaître est le propre de l’homme, et par là désespérer. La science, qui est l’homme qui se connaît, est aussi sa torture.

Pour bien penser, il faut ne tenir aucun compte du cœur ; et le cœur se supplicie de cette pensée, et qu’elle ne tient pas compte de lui.

Qui se voit vivre, se voit mourir. Un seul regard sur la mort, une seule réflexion, et voilà dans sa froide clarté toute l’horreur de la duperie. Imaginer le néant, c’est déjà s’anéantir ; et la raison chancelle : inutile sommet, où l’on ne trouve que le vertige.


Je t’envie, mon Amour : tu ne m’as pas vu mourir.