Page:Suarès - Sur la mort de mon frère.djvu/205

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mon chéri. Je pars, moi aussi, si tu pars. Cette lugubre nuit ne me fait pas peur. Où m’attends-tu, si ce n’est ici ?

— Je ne puis te le dire. Si tu le savais, tu ne voudrais plus attendre, tu y courrais avant le temps.


Je l’embrassai étroitement ; mon cœur avide s’écoutait battre sur le sien. Je murmurai :

— Ils ont dit : quinze jours, et pourtant tu n’es pas parti… — Il me regardait avec un grave sourire, et sa main tenait ma main. Dans un frisson d’effroi, je me pris alors à pleurer.

— Je le sens : nous allons être séparés encore… Ainsi, je te reverrai ? — Et je ne pouvais arrêter mes larmes, au clapotis plaintif de la mer.

— Tu me reverras. Écoute, fit-il en me