Page:Suarès - Sur la mort de mon frère.djvu/214

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

l’autre branche, et l’œil ignore comment il est lié à l’œil, mais il arrive que l’un des deux yeux s’éteigne, et qu’on soit aveugle. Et tel arbre à deux branches est mort, dont une a été abattue d’un coup brusque.

Le désir infini du bien de ce qu’on aime, c’est l’amour et jamais plus pur que dans l’amour fraternel. Aimer, plus qu’être aimé, — et de la sorte, sans le vouloir, être payé de retour : être aimé au delà de ce qu’on aime. Le même sang aide à la même pensée. On se comprend à demi-mot. Le bonheur des amants est une lutte ; il est fait d’une victoire ou d’une défaite ; il est avide de conquérir, ou d’être conquis. C’est pourquoi il ne va pas sans victime, et comment il est si rare qu’il dure. La vierge antique disait vrai, quand, au milieu de la ville prise,