Page:Suarès - Sur la mort de mon frère.djvu/215

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

du palais en flammes, des hommes égorgés, du massacre et du sac, elle répondait au vainqueur, qui lui laissait le choix de sauver une seule vie entre toutes les victimes de la maison : « Sauve mon frère. »

La tendresse fraternelle ne m’abuse pas : dans sa pleine beauté, elle est rare à l’égal de toutes les autres ; mais elle les passe toutes pour la constance et la douceur inaltérées. Tout est accord dans la grande tendresse ; dans l’amour de désir, tout est contrarié : la tendresse même qu’il recherche, il la trouble de terribles contradictions. La grande tendresse n’aspire qu’à durer ; l’amour de désir n’aspire qu’à s’épuiser.

Je l’accorde, nul amour ne souffre qu’on le mesure. Il est ce qu’il est, et ne se compare pas. Si vous aviez perdu votre père, votre mère et vos enfants du même