Page:Suarès - Sur la mort de mon frère.djvu/236

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et sans calcul : elle ne se prouve point ; elle ne se connaît même pas. Ainsi, l’œil aime l’œil ; et dans l’œil, ainsi la prunelle aime le regard, et le regard la prunelle. Viens donc : c’est Lui qui t’y invite.

Le Mourant. — Tu parles avec amour. Où est-il ? Où est-il à cette heure ? Ha…

Le Samaritain. — Ne le trouble pas. On ne doit pas tourmenter les morts d’une contemplation incessante de leur mystère. Il faut laisser faire à la chère âme, en paix.

Le Mourant. — Le soleil est tombé dans la nuit. À mon tour de descendre dans la tombe, où mon cœur est resté.

Le Samaritain. — Oui, la nuit est venue. Mais la flamme rouge de ton cœur est ici, qui brûle ; et ton sang coule. Ne résiste plus. Il est sur le seuil ; il t’appelle et il dit : Entre, mon frère.