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SUR LA MORT

de son départ. Sans le moindre souci du succès, sans la moindre idée peut-être de l’obtenir, les deux frères étaient hommes à tout entreprendre et à ne jamais reculer dans ce qu’ils avaient entrepris. Chacun d’eux poussait l’autre et l’aidait à la pleine possession de soi-même. Toute la force, pourtant, que François Talbot mettait à se garder dans la solitude, son frère la voulait porter dans la conquête. Le remède à la vie, il ne le cherchait même pas : cette âme vaillante le trouvait sans cesse dans l’action. L’ivresse pour lui en était telle, qu’elle eût guéri le mal, s’il en avait été atteint. Et François Talbot, lui aussi, prenait dans l’art le même enchantement et une égale consolation. Le malade, parfois, ne sentait plus sa maladie ; il oubliait souvent qu’il en eût jamais souffert. Un orgueil instable l’éloignait de