Page:Suarès - Sur la mort de mon frère.djvu/28

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

« Perdu ! » me dit-il ; et je ne sais s’il parlait de lui ou de son frère, peut-être de tous les deux. « Perdu ! Dans toute sa force, dans sa beauté et son espoir… Car Il comptait, non sur la vie, sur sa force pour vivre.

» J’ignorais le regret, jusqu’ici : mais j’ai bien appris que regretter, c’est se lamenter sur un mort. »


Je pris place près de lui. Nous étions assis devant la mer. Les nuages violents couraient sur le ciel ; et le ciel violet courait sur les vagues. Il parlait à voix basse, comme en grondant. Je l’entendais à peine. Si c’est son visage ou ses paroles que j’écoutais, je ne sais ; mais le texte était sombre. Il disait : Il y a plus d’une joie. Mais comme il n’est qu’un amour, il n’est