Page:Suarès - Tolstoï.djvu/113

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monde. Elle triomphe comme on s’humilie. On le fait beau, on l’aime divin, ce monde, — pour qu’il le soit. Humiliation incomparable, où tout l’être s’incline par amour.

La douceur naît dans le cœur des grands violents par une vue de la vanité de toutes choses. En ce peu, qu’est-ce que le plus ? ou la victoire ? ou l’empire ? — Le grand homme n’arrive point au terme de son œuvre, sans un amer sourire. Car il ne touche point au terme de son désir. Un dégoût, profond comme le repentir, voilà sa borne. Il a besoin d’être pardonné. Il cherche le pardon d’avoir été grand. Car, s’il l’a vraiment été, il sait ce que cette grandeur coûte. Ce comble de rien.



« Quelle œuvre vaut les larmes qu’elle a fait couler ? Quel bienfait peut s’égaler à celui d’avoir séché ces larmes, après celui de les avoir épargnées ? Quelle grandeur approche la bonté, dont la caresse chaste arrête la plainte sur les lèvres, et retient sur les yeux les pleurs qu’ils allaient répandre ?

« L’innocence seule peut connaître le bonheur ; car elle ignore le mal. Voilà des enfants rieurs,