Page:Suarès - Tolstoï.djvu/112

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en participer, parce qu’elle les frappe et qu’ils en sont victimes. La foule immense des violents, depuis les bourreaux jusqu’aux femmes qui les admirent, adule secrètement son désir de l’injustice, et rougit de la douceur. Combien différente par là des grands violents…

Peut-être aussi les hommes sont-ils plus doux en Orient qu’ailleurs, et plus paisibles. Ils ont beaucoup souffert, et depuis plus de temps. Ils sont encore prêts à subir toute sorte de tortures. La même force les soutient dans les supplices, et dans l’amour de ceux qui les y arrachent. Là-bas, ni l’innocence ni la douceur ne sont tout à fait un objet de mépris. Mais on y voit des clartés divines.

Tous les prophètes ont été violents par douceur, et jusqu’à la mort. Dans son transport le plus sublime, Jésus garde le silence. Il ne répond à toute la force de l’univers, à Rome, à la mort, aux Juifs, à l’abandon de ses amis, aux soufflets, à la croix, à la moquerie même et aux épines, que par le mot unique d’une douceur unique : « Tu l’as dit. »

La douceur est un don de soi à la beauté du