Page:Suarès - Tolstoï.djvu/49

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russe fait son salut. À combien d’erreurs, de crimes involontaires, de coutumes perverses, Bésoukhow et la Russie, rougissant de leurs propres forces, la vue courte, les membres embarrassés, ne s’étaient-ils pas abandonnés dans leur mollesse ? — Mais quand Bésoukhow, dans le malheur de la patrie, a tout perdu, et l’intérêt même de vivre, — le moujik, qui a tiré la Russie de la mort, lui rend le goût de la vie. Bésoukhow se connaît un frère dans l’humble camarade, dont ni les souffrances, ni la mort ne désarme la foi. Tolstoï a compris que le peuple russe est né en ce jour. Dès lors, Bésoukhow décide de vivre à la mode de son peuple, en paix, presque en communauté, s’il se peut, avec tous les hommes de sa race, en formant un foyer, où tous ont, plus qu’ailleurs, quelque chance d’être admis, — et le plus près possible de la terre.

Lévine n’est autre que Bésoukhow retiré dans ses quartiers, à la campagne. La vraie Russie est aux champs. Les villes y sont, presque partout, de vastes villages. Lévine comprend assez tôt qu’il n’est pas plus possible à l’homme policé de faire un paysan, qu’au paysan de devenir un seigneur. Le