Page:Suarès - Tolstoï.djvu/66

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à toute force ; car, sans la foi, il leur semble n’avoir rien. Tel est l’inconvénient, pour l’intelligence, d’être plus passionné qu’intelligent, ou, du moins, de laisser les passions gagner le seuil de l’entendement.

Mais Tolstoï ne conçoit qu’une foi humaine, directe aux intérêts humains, et dont la vérité oblige. Il revient à dire que Tolstoï ne doute pas de la vérité. Son évangile est tout rationnel. Sa morale est socratique : montrer aux hommes où est le vrai, c’est leur donner le bien, et les y forcer en quelque sorte. La guerre au mal est une critique de l’erreur. La vertu n’est que la vérité en action. Tolstoï est un sage, à la manière des anciens. Les saints de l’Antiquité — et chez les Hébreux même — sont des hommes plus intelligents que les autres, dont la saine intelligence découvre des vérités utiles à tout le monde. Tolstoï ne demande la foi ni à Dieu ni à la prière ; il ne l’attend pas de grâces surnaturelles. Lisez l’Évangile, comprenez la pensée de Jésus-Christ : c’est la simplicité, le bon sens, la vérité même. Quand vous en serez là, vous ne sauriez manquer d’être chrétien ; si vous êtes sincère, le