Page:Suarès - Tolstoï.djvu/71

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du Christ fit, pour elles, la vérité du christianisme ; son attente fit leur patience ; ses promesses firent leur salut. Ce nombre infini de larmes, de cris, de prières, de confidences ; ces appels de la mort et de la vie ; ces joies, détachées de tout, et ces douleurs, détachées de soi-même ; tous ces mouvements du cœur, depuis deux mille ans, ne sont pas allés à quelques paroles, fussent-elles les plus sages du monde. La force leur est venue de Celui qui les a fait entendre le premier. Le charmant François d’Assise imite son Maître jusque dans les marques de la croix et les stigmates du supplice. Le grand Pascal parle aux plaies amoureuses de son Dieu et ne l’eût point fait qu’à son Dieu. Pour le moins, que le chrétien ne voie pas seulement dans l’Évangile un recueil de maximes. Qu’il y laisse l’homme, s’il en ôte le Dieu. Et voilà Tolstoï qui, à force d’être humain, dépouille le christianisme de l’un et de l’autre, pour faire la place unique à la raison.

Par là, on voit assez que Wagner et lui n’auraient jamais pu se comprendre. Ils sont opposés, comme deux hommes ne sauraient l’être davantage : sentiments, vues du cœur et de la pensée,