Page:Sue - Arthur, T1, 1845.djvu/126

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mes livres favoris ; mais, avant tout, j’aurais désiré être seul…

Rien ne m’empêchait sans doute de me retirer chez moi, mais je savais qu’il y aurait du monde là ; je serais obligé de donner des motifs, ou d’être en butte à des questions, bienveillantes sans doute, sur ma santé, mais qui m’eussent été insupportables ; en un mot, je le répète, dans ce moment, je me trouvais véritablement malheureux de ne pouvoir être seul.

Je ne cite ce fait puéril que parce que ce capricieux besoin de solitude si étrange au milieu des émotions que j’éprouvais, et si peu ordinaire à l’âge que j’avais alors, me semble une sorte de singularité héréditaire.

À ce propos, je me souviens que ma mère me disait toujours qu’avant de se retirer à Serval, et par nécessité de position, mon père étant obligé de voir beaucoup de monde, à Paris, sa morosité et sa misanthropie habituelles, lors de ses jours de réception, s’exaltaient à un point extraordinaire ; et pourtant, une fois à l’œuvre, si cela se peut dire, il était impossible de recevoir avec une grâce, une aménité, une délicatesse de tact plus parfaite et plus exquise : aussi était-ce, me disait ma mère, ce mensonge forcé de trois ou quatre