Page:Sue - Arthur, T1, 1845.djvu/138

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les plus infâmes sous l’apparence des plus naïves inspirations, les projets les plus odieux sous les plus soudains et les plus généreux dévouements ; j’ai bien souvent enfin, avec une sécheresse désolante, tué d’un mot les plus tendres et les plus suaves élans ; mais jamais, mon Dieu, jamais je n’oublierai le douloureux brisement qui me déchira, lorsque le scepticisme arracha de mon cœur cette sainte et première croyance.

De ce moment, on eût dit qu’un crêpe funèbre enveloppait tout à mes yeux ; la figure d’Hélène si candide et si pure ne me partit plus que fausse et cupide… La trame la plus noire sembla se dérouler à ma vue : l’insouciance de ma tante me parut bassement calculée ; cette lettre enfin qui l’avertissait des bruits qui couraient dans le monde me sembla supposée ; alors, avec un orgueil cruel, je m’applaudis d’avoir deviné et de pouvoir déjouer cette ligue honteuse faite contre moi, qu’on prenait pour dupe.

Par une inexplicable et subite réaction, tout mon amour se changea en haine et en mépris ; les plus tendres épanchements me parurent ignoblement simulés. O honte ! ô misère ! jusqu’au souvenir de cette affection enfantine