Page:Sue - Arthur, T1, 1845.djvu/140

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les influences, les instincts, ou l’organisation naturelle, qui firent germer et développèrent en moi le doute, qui sera désormais le centre autour duquel graviteront toutes mes pensées, dans quelque position, apparemment indubitable, que je me trouve, je me souviens que mon père me disait parfois : « C’est avec contentement que je vous vois défiant de vous-même… quand on se défie de soi, on se défie des autres, et c’est là une grande sagesse. "

Puis, par un singulier et étrange contraste, ma mère, aveuglée par l’orgueil maternel, sorte d’égoïsme sublime, qui est chez les femmes ce que la personnalité est chez les hommes, ma mère, après avoir souvent et vainement tenté de m’exalter à mes propres yeux, me disait tristement : « Mon pauvre et cher enfant, je suis désespérée de te voir si défiant de toi : à force de ne pas croire en toi, tu ne croiras jamais aux autres, et c’est là un terrible malheur. »

Or, je suis certain que cette défiance insurmontable de moi-même fut pour beaucoup dans les doutes qui m’accablèrent ; ne pensant pas inspirer les sentiments qu’on me disait éprouver pour moi, ils me semblaient alors faux et exagérés ; et n’y croyant pas, je leur cherchais