Page:Sue - Arthur, T1, 1845.djvu/158

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plus éclatantes encore ; je vis, j’appréciai amèrement une à une toutes les chances de bonheur que j’avais perdues. Où devais-je jamais trouver tant de conditions de félicité réunies : beauté, tendresse, grâce, élégance ? Que dirai-je ! alors l’avenir sans Hélène m’épouvantait, je ne me sentais ni assez fort pour mener une vie solitaire et retirée, ni assez fort pour traverser peut-être sans faillir les mille aspérités d’une existence aventureuse et sans but ; je présentais d’ardentes passions, j’avais tout pour m’y livrer avec excès, indépendance, fortune et jeunesse ; et pourtant cet avenir, désirable pour d’autres, m’affligeait ; c’était un torrent que je voyais bondir, mais dont je ne prévoyais pas l’issue : devait-il s’abîmer dans un gouffre sans fond ? ou plus tard, calmant l’impétuosité de ses eaux, se changer en un courant paisible ?

Puis, défiant et dur comme je venais de l’être, presque malgré moi, avec Hélène, si noble et si douce, à quel amour, désormais, pourrais-je jamais croire ? Ainsi, je ne jouirais pas même de ces rares moments de confiance et d’épanchements qui luisent parfois au milieu des orages des passions ! En un mot, je le répète, l’isolement m’épouvantait ; car il m’eût