Page:Sue - Arthur, T1, 1845.djvu/63

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Ah ! monsieur, je ne puis me reprocher l’amertume de ces paroles, car elles exprimaient mon horreur contre une conduite que je trouve à cette heure aussi criminelle qu’alors ; et pourtant, depuis, j’ai eu la faiblesse de m’en repentir… Enfin ce jour-là, en entendant ces mots, auxquels mon indignation prêtait une grande énergie, tous les yeux de nos montagnards se tournèrent aussitôt vers cette malheureuse femme, humblement agenouillée parmi eux : sa tête se courba davantage ; elle ramena les plis de son voile sur son visage, et il me parut, à quelques mouvements saccadés de ses épaules, qu’elle pleurait beaucoup… Je triomphai, car je pensais avoir éveillé le remords, peut-être endormi jusqu’alors, dans une âme coupable. Le service divin terminé, je rentrai au presbytère.

Sans rien redouter de la colère du comte, qui pouvait se croire offensé de ces allusions, j’étais néanmoins préoccupé malgré moi de ce qu’il en pouvait penser. Le lendemain, il me vint voir. Quand ma sœur m’annonça sa visite, je ne pus me défendre d’une certaine émotion ; mais je trouvai son accueil aussi bienveillant que d’habitude : il ne me dit pas un mot du sermon de la veille, causa longuement arec